Rapidement propulsé chef de la table du Château de Courban quelques mois seulement après son arrivée, Maxime Lesobre s’est vu proposer le défi d’aller récupérer l’étoile Michelin au plus vite. Nullement impressionné par le challenge qui était pour lui un objectif personnel, le jeune chef passé par les plus belles cuisines parisiennes, s’est lancé à corps perdu dans le projet avec réussite.
La jolie facade rouge du Château de Courban
La jolie facade rouge du Château de Courban
© Christophe Fouquin

Le Château de Courban s’est bâti une solide réputation dans le Guide rouge. Après avoir collaboré pendant 8 ans avec le chef Takashi Kinoshita et obtenu un macaron avec lui en 2018, il a fallu envisager l’après lors de son départ en 2023.

Une transition jamais évidente puisqu’il s’agit de se mettre en quête de celui ou celle qui sera capable de prendre les rênes de la cuisine et de la brigade, de maintenir les plus hautes exigences et de trouver en un temps record la recette qui marche pour ne pas dévoyer la réputation du restaurant. Mylène et Frédéric Vandendriessche, les propriétaires du Château, ont trouvé avec Maxime Lesobre une relève incontestable. Le Parisien de naissance qui a grandi dans le 13e, à côté de la Place d’Italie, n’avait jamais mis un pied en Bourgogne. Fils de bouchers, il n’aimait pas trop l’école et préférait passer du temps à aider ses parents en boutique. Mais à 15 ans et demi, quand il se pose la question de choisir une vocation, il ne choisit pas la boucherie :

« Je voulais construire mon propre parcours et ne pas opter pour la solution de facilité ».

C’est en repensant aux grandes tablées familiales qu’il a connues enfant qu’il choisit de s’orienter vers la cuisine : « Dans ces moments où l’on se rassemble autour d’un repas, il y a de la sensibilité et beaucoup d’amour. Je me suis dit que je voulais faire ressentir cela aux autres. ».

Une des dépendances du Château de Courban
Une des dépendances du Château de Courban
© Christophe Fouquin

Un parcours exceptionnel

Dans le but d’acquérir les bases, il se tourne vers l’école Ferrandi à Versailles, la crème de la crème de la formation culinaire. Pour y entrer, il a fallu convaincre : « Je me suis rendu aux journées portes ouvertes et c’est pendant ce moment d’échange et de découverte qu’ils ont su déceler ma détermination et mon envie. ». C’est ainsi qu’il intègre l’institution et qu’il y reste 4 ans : 2 ans en BEP et 2 ans en brevet professionnel. « Mon premier plat était un filet de sole Bonne Femme et je l’adore encore aujourd’hui, je le refais souvent. », explique-t-il. Parmi ses professeurs figure notamment Christophe Haton, meilleur ouvrier de France : « Là-bas j’ai appris les belles bases de la cuisine gastronomique avec exigence. C’est en sortant de l’école qu’on se rend compte qu’en fait il y a encore beaucoup de choses à apprendre… ».

Entre la formation scolaire et le terrain, il peut effectivement y avoir un grand écart. Une fois diplômé, c’est tout naturellement qu’il commence son parcours à Paris. Il débute au sein du Laurent sur les Champs-Élysées auprès du chef Alain Pégouret, 1 étoile au Guide Michelin à l’époque. De cette expérience il garde un souvenir de cuisine un peu militaire où l’on se frotte réellement à la rigueur de la gastronomie française : « J’étais jeune et dissipé, j’avais besoin d’être cadré et canalisé. Je suis rentré quelques fois en pleurant, mais ça m’a fait du bien. » concède-t-il. Ensuite, il participe à la réouverture du Royal Monceau avec l’équipe d’Alain Ducasse.

De la préparation des amuse-bouche et des entrées au Laurent, il passe au chaud, une vraie marque de confiance dans un palace tel que celui-là. Plus tard, une rencontre fait toute la différence, celle du chef Frédéric Robert qu’il considère comme son « papa de la cuisine », un mentor dont il ne peut se défaire : « Je l’appellerai chef à vie. » ajoute Maxime Lesobre. Il entre à La Grande Cascade (1 macaron Michelin) en tant que commis puis passe très rapidement demi-chef de partie et chef de partie. Une évolution qui déclenche chez lui une envie irrépressible de passer des heures en cuisine, de faire plus et toujours mieux : « Il a déclenché une machine de guerre, j’étais focus uniquement sur la cuisine et sur le travail. J’ai été élevé dans cet esprit. Toute ma vie, j’ai vu mon grand-père aller bêcher le potager et mon père tout donner dans sa boucherie. On m’a transmis le sens de l’effort. ». Après deux années passées auprès de son mentor, Maxime Lesobre passera notamment par L’Arpège aux côtés du triplement étoilé Alain Passard. De cette expérience il garde un souvenir mitigé : « Sur le moment, j’étais trop jeune pour comprendre sa cuisine qui est très brute et qui valorise le produit avant tout. Avec le recul, je pense que je suis un peu passé à côté. ». S’en suivent encore de belles expériences, notamment auprès de Michel Rostang (2 étoiles) et Jérôme Banctel (3 étoiles)… « J’aime choisir les cuisines où je vais. Je choisis ce qui me parle. », détaille Maxime Lesobre.

Une des dépendances du Château de Courban
Une des dépendances du Château de Courban
© Christophe Fouquin
Christophe Fouquin
Christophe Fouquin
© La salle de restaurant du Château de Courban
Le Château de Courban
Le Château de Courban
© Christophe Fouquin
La facade du Château de Courban et la piscine
La facade du Château de Courban et la piscine
© Christophe Fouquin

À Courban, la consécration

Arrivé en octobre 2023 au Château de Courban, le chef vient apporter son aide à Nicolas Thomas pour les fêtes de fin d’année. Rapidement, les propriétaires lui proposent de s’installer en cuisine et de prendre en main la brigade. L’objectif est clair, il faut récupérer l’étoile tombée récemment. Une ambition qui correspond parfaitement au projet de Maxime Lesobre qui s’est mis en tête de décrocher son premier macaron, bien à lui : « Je savais que j’étais capable de le faire si on me mettait les moyens à disposition. Il n’a jamais été question pour moi d’être un exécutant, j’ai toujours voulu créer ma propre cuisine. Et je sais qu’un jour j’aurai les 3 étoiles. ». Au Château de Courban, le chef a carte blanche pour composer sa cuisine. Étant donné qu’il ne connait pas la Bourgogne, il commence par repérer les produits locaux et les exploitations qui valent le détour comme les légumes des Jardins du Cosmos à Leuglay, les truites à Veuxhaulles-sur-Aube, les œufs de la Ferme du Pontot à Gevrey-Chambertin… Au fil des saisons mais surtout de ses envies, le chef fait évoluer la carte : « Dès que je m’ennuie, on change tout. ». Quand on lui demande quelle ligne conductrice il suit en cuisine, le chef aime à rappeler que « la seule règle c’est qu’il n’y a pas de règles ». Il n’aime pas faire de la cuisine comme les autres et ça se voit. Toute sa technique, il l’associe à un feeling exacerbé : « Tout est rangé dans mon cerveau. J’ai une mémoire avec des goûts et quand j’ai une idée je la travaille jusqu’à ce que ça marche. ». En observant les assiettes du chef, on reconnait les produits, tout parait simple et limpide. En apparence seulement. Chaque élément de la recette est en réalité d’une grande complexité, travaillé longtemps, avec technique et précision. Seule la dégustation permet de comprendre toute la délicatesse de la réalisation. De toute évidence, le Guide Rouge a immédiatement su apprécier cette cuisine de détails en la récompensant d’une étoile dès la première année.

« Je savais que j’étais capable de le faire si on me mettait les moyens à disposition. Il n’a jamais été question pour moi d’être un exécutant, j’ai toujours voulu créer ma propre cuisine. Et je sais qu’un jour j’aurai les 3 étoiles. »
Maxime Lesobre
Une des dépendances du Château de Courban
Une des dépendances du Château de Courban
© Christophe Fouquin

Un travail d’orfèvre

Maxime Lesobre aime expliquer sa cuisine par la démonstration. C’est ainsi qu’il nous entraine dans la réalisation de son plat signature, en tout cas celui qu’il considère comme véritablement abouti : sa tarte à l’oignon revisitée. Il marche d’un bout à l’autre de la cuisine, nous invite à observer les oignons cuits en croûte dans le sel de mer naturel mais aussi les petites pâtes brisées parfaitement moulées, cuites au four à la minute près pour avoir la consistance idéale et une couleur brune appétissante. Les oignons, il vient les vider et les éplucher un par un pour ne garder qu’une coque translucide qu’il va farcir avec trois éléments travaillés séparément : un jus d’oignon réduit pendant des heures, une compotée d’oignons très onctueuse et gourmande à la cecina de bœuf et enfin une pâte de truffes. Pour finir, le Beaufort gratiné vient apporter la touche finale ainsi que les chips d’oignons.
Cette recette lui a été inspirée par la dégustation de la soupe à l’oignon du chef triplement étoilé Christian Le Squer : « C’est une recette complètement traditionnelle que tout le monde connait. Ce que je veux quand on déguste la mienne c’est qu’on soit surpris. Je veux perturber puis rassurer. » explique-t-il. En scrutant la cuisine de Maxime Lesobre, on comprend que le secret est de travailler chaque produit indépendamment et avec patience. Une évidence lorsque l’on tombe nez à nez avec les cabillauds de ligne suspendus dans un frigo en pleine maturation. Une façon de laisser la chair se concentrer en sel naturellement. Et le chef d’ajouter : « Mes sauces sont construites avec des jus qui mijotent plusieurs jours. D’ailleurs dedans il n’y a pas un gramme de sel, le goût salé est uniquement dû à la réduction. Je fais aussi mes huiles, mes vinaigres, mes kimchis ». L’équilibre des saveurs est également important : « Je travaille aussi beaucoup sur les acides et sur l’amertume. Pour alléger les graisses, je joue beaucoup avec l’acidité, les agrumes. ». Toute cette confiance et cette créativité sont volontiers transmises aux équipes. Dans sa brigade, Maxime Lesobre compte beaucoup de stagiaires français et étrangers avec qui il a à cœur d’être bienveillant : « La cuisine c’est le partage, c’est naturel. Je leur apprends à ne pas seulement dire « oui chef », je veux qu’ils comprennent la cuisine, qu’ils osent des choses. ». D’ailleurs, il n’hésite pas à mettre la cheffe pâtissière Saé Haségawa en avant qui célèbre 10 ans de maison cette année. Douée et précise, elle a toute la liberté de développer sa créativité au cœur de la brigade. Elle signe plusieurs desserts devenus incontournables comme la mirabelle gingembre ou sa glace panais vanille. Quand on demande au chef ce qu’il faut faire de plus pour atteindre la 2e et la 3e étoile, il répond : « Plus de show. Il faut oser en salle, faire plus de démonstration culinaire et faire vivre aux convives une expérience qui implique tous les sens. ». Un aperçu de l’avenir à la table du Château ? Ce qui est sûr, c’est que le restaurant gastronomique du Château de Courban est une main tendue pour aller plus loin et découvrir un lieu exceptionnel qui est plus proche d’une maison de campagne conviviale et paisible que d’un hôtel-restaurant classique.

Maxime Lesobre en cuisine au Château de Courban
Maxime Lesobre en cuisine au Château de Courban
© Christophe Fouquin
Pâté croûte de chevreuil, poire, carotte et gingembre
Pâté croûte de chevreuil, poire, carotte et gingembre
© Christophe Fouquin

Loin des normes

Certes, la superbe table auréolée d’un macaron est un formidable produit d’appel pour inviter les locaux, touristes et visiteurs à s’arrêter dans la petite commune de Courban. Mais le château vaut à lui seul le détour. Havre de paix incontestable, il permet de se ressourcer en toute quiétude. Cette ancienne demeure de 1820 construite sur les ruines d’un château a été rachetée en 1998 par Pierre et Christine Vandendriessche. Ensemble ils ont totalement transformé les lieux qui étaient à l’abandon pour en faire progressivement une maison d’hôtes : « Initialement, mon père voulait faire de la demeure une grande maison de famille où nous nous serions tous rejoints le weekend. Sauf que nous ne venions pas aussi souvent qu’il l’aurait souhaité. Jusqu’au jour où un groupe de chasseurs est venu demander le gîte et le couvert pour le plus grand plaisir de mon père qui a trouvé en eux des compagnons pour faire vivre la maison. » explique Frédéric Vandendriessche, désormais propriétaire des lieux avec son épouse Mylène. C’est ainsi que la mue a commencé pour arriver au domaine actuel doté de 26 chambres 4 étoiles, d’un spa Nuxe, d’une ligne de nage et d’un restaurant gastronomique renommé.

« Beaucoup d’habitués viennent ici. Pour certains, c’est leur halte privilégiée sur un trajet qu’ils font chaque année. C’est très dépaysant. » ajoute Frédéric.

Dans ce lieu où rien n’est standardisé, le charme opère immédiatement, aussi bien dans les superbes jardins à la fois sauvages et entretenus avec soin que dans les chambres uniques comme celle située dans l’ancien pigeonnier. Mais le Château ne se repose pas sur ses lauriers et cherche toujours à améliorer l’expérience des visiteurs notamment avec l’installation récente de la nouvelle chambre baptisée La Rotonde. Celle-ci est au cœur du jardin et s’ouvre à 180° sur un espace extérieur privatif de 150 m2. Les projets pour l’avenir ne manquent pas et le Château a encore de beaux jours devant lui.

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