Originaire du nord de la France avec le bord de mer pour paysage d’enfance, Jean-Bruno Gosse a rejoint la Bourgogne il y a quelques années et en est tombé fou amoureux. À seulement 35 ans et déjà récompensé d’une étoile dans son précédent établissement, il vient de s’installer derrière les pianos de la Table des Climats, ce restaurant à part qui propose une expérience vinogastronomique inédite. Avide de savoir et intellectuellement insatiable, ce chef aux multiples facettes vit sa vocation pleinement et s’applique à cuisiner dans les règles de l’art…

La Table des Climats n’est pas un restaurant comme les autres puisqu’il a comme écrin La Cité Internationale de la Gastronomie et du Vin. Au-delà de ses ambitions de table gastronomique pour épicuriens de tous horizons, il se doit aussi d’être le reflet de la richesse du terroir bourguignon et plus largement de l’art du « bien manger » et
« bien boire » typiquement français. La Table des Climats fonctionne en synergie avec La Cave de la Cité et ses plus de 3000 références de vins, ainsi qu’avec Le Comptoir de la Cité où l’offre est bistronomique. Trois propriétés de l’ambitieux groupe Épicure spécialisé dans la restauration haut de gamme. La Table des Climats prend place au pied de la Grande Chapelle, au cœur de l’ancien hôpital, plus précisément dans ce qui était le logis du directeur. À l’intérieur, on retrouve toute l’ambiance bourguignonne que nous, natifs, chérissons tant : les vieilles pierres apparentes qui donnent à la bâtisse une allure de cave, du bois brut ici et là, des flacons de vins jusqu’au plafond et des cartes des différentes régions viticoles… Un concentré de terroir qui attire autant les locaux que les visiteurs venus d’ailleurs. Tout juste arrivé aux manettes des cuisines, le chef Jean-Bruno Gosse a repris en main le concept vinogastronomique de la maison qui consiste à accorder sa cuisine aux climats de Bourgogne en associant une recette à un vin soigneusement choisi. Avec la confiance du groupe, il a carte blanche pour exprimer sa cuisine, mélange d’héritage et de créativité.

Cave de la table des Climats
Cave de la table des Climats
© Jonathan Thevenet
Facade de la Table de Climats
Facade de la Table de Climats
© Christophe Fouquin
Table des Climats Salle
Table des Climats Salle
© Christophe Fouquin

Inspiration vintage

Pour devenir chef, on n’est pas toujours tombé dans la marmite quand on était petit. Jean-Bruno Gosse n’est pas né dans une famille de cordons-bleus : « Personne n’est du métier dans ma famille. Le weekend, mon père aimait bien cuisiner des plats qu’il faisait mijoter pendant 8 heures… Il cuisinait convenablement même si un jour on s’est moqué de lui en surnommant son plat « bourre-cochon » car il faut bien avouer que c’était raté ! » dit-il en souriant. Ce qui a véritablement fait naitre sa volonté de devenir chef, ce sont les émissions de cuisine du dimanche matin des années 90-2000 qu’il ne manquait jamais lorsqu’il était enfant, celles de Maïté, Jean-Luc Petitrenaud, Joël Robuchon… « Je collectionnais même les fiches de recettes qu’on trouvait à la fin des magazines féminins comme Marie-Claire. J’en ai encore chiné quelques-unes en brocante récemment. ». Une vision vintage de la cuisine que Jean-Bruno Gosse apprécie particulièrement, les présentations à l’ancienne, les plats en sauce, les légumes disposés en cercle tout autour de l’assiette, les cocottes bien remplies, des images qui évoquent des souvenirs chez chacun d’entre nous sans aucun doute ! À 14 ans, on lui explique qu’il peut déjà travailler et s’orienter vers la cuisine, un choix que ses parents refusent au regard de ses résultats scolaires en lui intimant de poursuivre ses études. Il obtient un bac scientifique et poursuit avec une licence d’art, sa deuxième passion, à l’université d’Amiens : « Je suis à la fois dingue de chiffres, de datas, de données en tout genre, mais aussi d’art et d’expositions. Si je n’avais pas été chef cuisinier, j’aurai aimé être sculpteur ou peintre. », explique-t-il, « Une fois mon cursus terminé, je ne savais pas quoi faire alors je suis allé voir la conseillère d’orientation. J’étais prêt à tout recommencer à zéro s’il le fallait et elle m’a dit de faire un BTS hôtellerie-restauration. Ça a été une révélation. ». Une réorientation qu’il ne regrette pas car la fac lui a permis de ne pas grandir en cuisine, de voir autre chose avant de confirmer son envie d’y passer le reste de sa vie. Une fois lancé dans cette passion dévorante, plus rien ne pouvait l’arrêter : « Tout ce qui rentre dans ma tête et qui concerne la cuisine n’en sort jamais. ».

« Tout ce qui rentre dans ma tête et qui concerne la cuisine n’en sort jamais. ».
Jean-Bruno Gosse
Table des climats Salle
Table des climats Salle
© Christophe Fouquin

Bourgogne lover

C’est ainsi qu’il débute son parcours à l’Hostellerie Saint-Martin avec le chef aux deux macarons Michelin, Yannick Franques. Il y passe deux saisons estivales avant de faire une saison hivernale à Courchevel pour l’ouverture du palace L’Apogée. Finalement, c’est Philippe Augé, le chef étoilé de l’Hostellerie de Levernois qui l’appelle pour lui proposer une place de premier commis : « C’était une très belle opportunité, d’autant que je n’avais fréquenté que des établissements saisonniers, cette fois j’allais travailler en continu et découvrir les changements de saisons… ». À son arrivée dans la région, pourtant la plus éloignée de toutes les mers et du paysage qui l’a vu grandir, c’est le coup de foudre, pour la Bourgogne et pour une Bourguignonne. Par ailleurs, le chef Philippe Augé, aussi talentueux qu’attachant devient un véritable mentor :

« J’ai rencontré une vraie personne, sincère et honnête, qui vit ses émotions pleinement. Je me suis senti très proche de lui, il m’a transmis énormément tant sur le plan culinaire que sur le plan humain. ».

Après deux ans à ses côtés, Jean-Bruno Gosse fait un détour par la Suisse auprès de Georges Wenger, doublement étoilé, avant que Georges Blanc ne le contacte pour lui proposer de faire l’ouverture du Pré aux Clercs à Dijon. Convoqué pour être second, il passe finalement chef immédiatement : « Georges Blanc est l’une de mes idoles d’enfance, j’ai eu la chance d’avoir des conversations privilégiées avec lui et d’échanger sur nos visions de la cuisine. C’est comme si j’avais parlé à ma télé ! ». Le chef réalise un rêve de gosse. Il passe 5 ans dans l’établissement et cuisine pour 80.000 couverts par an, un rythme effréné qui ne l’empêche pas de travailler des beaux produits et de ne jamais transiger sur la qualité : « J’ai appris à connaitre les Dijonnais qui sont très épicuriens, à manager une équipe de 17 personnes et noué des liens avec les producteurs avec qui je travaille encore aujourd’hui. ». Puis il traverse la place de la Libération et rejoint le restaurant Loiseau des Ducs pour succéder à l’étoilé Louis-Philippe Vigilant. Un défi qu’il relève avec brio puisqu’à seulement 33 ans, il y obtient sa propre étoile au guide Michelin et continuera ainsi à faire briller la table du centre-ville durant les deux années qu’il passera là-bas.

La groseille blanche en gel et sorbet
La groseille blanche en gel et sorbet
© Christophe Fouquin
Jean-Bruno Gosse dans les cuisines de La Table des Climats
Jean-Bruno Gosse dans les cuisines de La Table des Climats
© Jonathan Thevenet

À la hauteur du terroir

Le parcours dijonnais du chef Jean-Bruno Gosse n’a pas été de tout repos : « J’ai à chaque fois repris des restaurants dont les chefs étaient des figures incontournables du paysage gastronomique comme Jean-Pierre Billoux puis Louis-Philippe Vigilant. J’ai eu l’habitude d’être comparé. ». En s’installant à la Table des Climats, le chef a l’opportunité de s’offrir un nouveau challenge et d’exprimer sans complexe son identité culinaire. Il signe ici une cuisine qu’il définit comme traditionnelle, bien ancrée dans les piliers classiques, relevée d’une vision contemporaine. Entre recettes de terroir revisitées et créations inspirées voire même les deux dans une seule assiette, Jean-Bruno Gosse mise sur la constance et la justesse. À la carte, le chef affiche ses deux plats signature, deux incontournables de la Bourgogne qu’il a longuement travaillés à sa manière. L’un deux est l’œuf en meurette, le Graal local qui est presque devenu un rite de passage pour les professionnels. Celui du chef a reçu le prix de la créativité au Championnat du monde qui a lieu chaque année au château du Clos de Vougeot. Contrairement à la recette classique, son œuf n’est pas poché, le blanc est travaillé en nuage et le jaune est cuit 24 heures à très basse température. Le résultat est à la fois très technique et visuellement créatif. Il n’en fallait pas plus pour conquérir le cœur des bourguignons. Une recette qu’il décline également en version 100 % végétarienne et c’est assez rare pour être souligné ! Pour aller plus loin dans la découverte de la cuisine du chef, c’est vers le pigeon sourcé chez Patrice Sanchez qu’il faut se tourner : « Je le désosse entièrement par l’intérieur puis je le mature au sel et au sucre pendant 20 jours. Une fois qu’il est confit, il n’a plus ce côté ferreux et lourd et je le cuis deux minutes à peine. ». L’accompagnement, quant à lui, varie en fonction des saisons. Pour composer ses plats, le chef va chercher la plupart de ses produits localement : « J’ai 5 ou 6 partenaires de grande qualité avec qui je travaille depuis des années. Que la table soit gastronomique ou bistronomique, je n’ai jamais changé mes produits bruts, pour moi il n’y a pas de différence si ce n’est la façon de les travailler. ». Parmi ses plus proches collaborateurs, il y a évidemment Patrice Sanchez à Corton mais aussi Le Potager des Ducs, La Ferme de Clavisy, la pisciculture du Moulin de Pierre ou encore Eric Coupé de la Ferme Le Charmoi. Sans oublier les vins, essentiellement bourguignons, qui viennent eux aussi jouer un rôle essentiel à sa table dans le respect du concept vinogastronomique de la maison :

« Patrick Bertron m’a transmis cette maxime : si vous faites une promesse dans l’assiette, il faut la tenir. C’est ce que nous faisons en tenant la promesse de la Table des Climats jusqu’au bout. ».

Œuf en meurette
Œuf en meurette
© Christophe Fouquin
Tartelettes « tatin de mûres »
Tartelettes « tatin de mûres »
© Christophe Fouquin
Table des climats Salle
Table des climats Salle
© Christophe Fouquin

Goûter les climats

Ici, c’est une vision totale de la gastronomie qui est proposée aux convives. À la carte, un plat est accordé à un vin en particulier sans pouvoir y déroger. Pour cause, Jean-Bruno Gosse oeuvre avec le chef sommelier Hugues Picot au moment de l’élaboration de la carte pour composer l’harmonie la plus parfaite. Par exemple, la recette de l’oeuf meurette est composée, entre autres, de vin et de moût de raisin de Gevrey donc le plat sera toujours accompagné d’un Gevrey-Chambertin. Si le pigeon est originaire de Corton, le vin qui l’accompagne sera lui aussi de Corton. Si bien que le chef cuisinier a développé son nez afi n d’opérer les meilleurs choix. Ce concept unique en son genre d’accord vins-mets permet à celui qui déguste d’appréhender la globalité du terroir : « Je suis en quelque sorte l’offi ce de tourisme de la Bourgogne et il est hors de question que je dégrade son image. ». Pour cette raison, chaque détail est travaillé. Ses sauces font aussi l’objet d’un travail de fond : « C’est toujours un jus cuit entre 1h30 et 2h30 suivi d’une réduction qui peut durer 6 heures. ». À ce niveau d’exigence, tout est important : « Je veux des plats élégants avec des goûts très francs. Tout est intensifié pour que le plat soit clair et lisible tout en réservant quelques surprises. ». Dans sa prochaine carte, Jean-Bruno Gosse proposera une recette bourguignonne délaissée qu’il remet au goût du jour, la pôchouse : « Je vais faire des quenelles de plusieurs poissons avec une sauce classique, quelques notes punchy et des condiments de safran de Brochon. ». Un plat qui devrait surement s’accompagner d’un vin de Brochon soigneusement choisi… La carte d’automne fera la part belle au potimarron, coing ou encore champignons, des recettes que le chef a peutêtre déjà couché sur papier puisqu’avant chaque dressage, il prend soin de réaliser un dessin à l’aquarelle qui pourrait sans aucun doute venir illustrer un livre de recettes. Si son aventure à la Table des Climats ne fait que commencer, nul doute que l’objectif à venir est de briller…

Publireportage