Audacieuse, piquante, la Moutarderie Fallot conduite par Marc Désarménien monte, mais pas seulement au nez. Vivifiante sous le palais, elle gagne aussi ses lettres de noblesse dans les assiettes. Comme Lucile Darosey, autre grande signature gastronomique de la maison Bernard Loiseau, le chef deux étoiles Patrick Bertron égraine dans ses recettes les bienfaits d’un condiment qui fait fort.

Produit incontournable de nos festins, la moutarde de Dijon, rehausse le goût de nos assiettes depuis plusieurs siècles. Souvent imitée mais jamais égalée, elle risque bien de vous donner, cette fois encore, quelques sensations fortes.

Fleuron de la gastronomie française, la moutarde de Dijon assaisonne et relève depuis plusieurs siècles les papilles des fins gourmets. Terre de vignobles, la Bourgogne s’est rapidement improvisée comme fournisseur de premier choix auprès des fabricants de moutarde. Et c’est Jean Naigeon – ancien propriétaire du Château de Gevrey-Chambertin – qui aura l’idée, en premier, de remplacer le vinaigre de médiocre qualité utilisé à l’époque par, le verjus, un jus de raisin vert de cépage Bourdelas, piquant et acidulé. Le succès de cet ingrédient fera rapidement la renommée de cette moutarde que l’on appellera désormais moutarde de Dijon. Très vite, les Ducs de Bourgogne se l’arrachent et font de ce produit l’indispensable des plus belles tables de l’époque.

Moutarderie Fallot
Moutarderie Fallot
© Arnaud Dauphin Photographie
Marc Désarménien
Marc Désarménien
© Arnaud Dauphin Photographie

A la fin du XIXème siècle, la culture des champs de moutarde est dévastée par la crise du Phylloxera. Le verjus devient donc un produit rare et se voit remplacé par du vinaigre de vin ou d’alcool. Quelques années plus tard, la culture de la moutarde en Bourgogne sera à nouveau fragilisée. Après la seconde guerre mondiale, l’Europe préfère privilégier la culture du colza au détriment des moutardiers qui disparaissent alors petit à petit, remplacés par des graines venues du Canada.

Au début des années 1990, la situation est critique : 98 % des graines de moutarde utilisées sont canadiennes contre seulement 2 % de graines bourguignonnes. Ils ne sont désormais plus que quatre moutardiers en Bourgogne à perpétuer la tradition. Parmi eux, un Beaunois résiste encore à l’envahisseur. Petit-fils d’Edmond Fallot, fondateur de la Moutarderie qui porte son nom, Marc Désarménien est à la tête de la dernière fabrique indépendante de Bourgogne. Très attaché à son patrimoine, il perpétue le métier de ses ancêtres en préservant l’une des traditions qui fait la renommée de sa moutarde, l’écrasement des graines à la meule de pierre.

Ils ne sont désormais plus que 4 moutardiers en Bourgogne à perpétuer la tradition.