Chef étoilé de l’Hostellerie de Levernois depuis 16 ans, Philippe Augé brille par son charisme et son aura lorsqu’il entre en cuisine. Son impressionnante régularité qui lui vaut un macaron ininterrompu depuis 2001 n’est pas à prendre à la légère. L’homme à la carrure imposante, bourreau de travail, dissimule un chef qui se remet toujours en question, constamment à la recherche du dépassement de soi. Le temps qui passe n’a rien enlevé à la fougue de ce compétiteur qui a embrassé la carrière de cuisinier il y a plus de 30 ans un peu par hasard…

Entourée d’un parc boisé de 7 hectares, cette ancienne maison de famille bourgeoise bâtie au XVIIIe siècle à quelques encablures de Beaune est devenue l’Hostellerie de Levernois au XXe siècle. Fondée par le chef Jean Crotet dans les années 80, il en a fait l’une des meilleures tables de la région en y obtenant deux étoiles. Au moment de prendre sa retraite en 2004, il transmet l’affaire à Jean-Louis et Susanne Bottigliero qui s’appliquent à poursuivre l’histoire de ce Relais & Châteaux devenu incontournable dans la région. Le couple, également propriétaire du Château Sainte Sabine, restera aux commandes pendant 17 ans jusqu’à transmettre à son tour l’établissement.

Séverine Pétilaire-Bellet, formée aux côtés de Jean-Louis Bottigliero 30 ans auparavant, décide de se rapprocher de ses racines dijonnaises en rachetant les deux établissements du couple. Celle que tout le monde appelle « Mademoiselle » a un objectif clair : faire basculer l’Hostellerie de Levernois vers des pratiques plus contemporaines tout en respectant l’intégrité des lieux. C’est ainsi qu’elle instille une dynamique plus sensible et hospitalière à l’ensemble du domaine pour lui rendre sa dimension authentique et naturelle. Quant à la table gastronomique qui a fait la réputation de l’adresse depuis sa création, elle reste le terrain de jeux de Philippe Augé.

Dirigeant Hostellerie Levernois
© Christophe Fouquin

Des mentors d’exception

Nantais d’origine mais fils de militaire, Philippe Augé a changé de ville plusieurs fois. Il passe sa jeunesse à Toulouse où il intègre l’école hôtelière : « Adolescent, je ne savais pas ce que je voulais faire de ma vie. Entre mécanique automobile et hôtellerie-restauration, j’ai choisi au pif ! ». Du hasard ? Peut-être pas tout à fait : « Ma mère était une bonne cuisinière. Tous les mercredis, on allait au marché ensemble pour acheter les produits frais. » confie-t-il. Néanmoins, il a fallu faire naître la passion : « J’ai eu la chance d’avoir des professeurs extraordinaires qui m’ont enseigné la philosophie et les valeurs de la cuisine. ».

Il aurait pu intégrer une brigade immédiatement après son BEP mais comme l’écrivait si justement Rimbaud, « on n’est pas sérieux quand on a 17 ans » : « J’étais jeune, je n’étais pas prêt à travailler », explique-t-il. Philippe Augé intègre alors un CAP de charcutier-traiteur qu’il décroche haut la main et poursuit avec l’obtention de son bac professionnel. Service militaire oblige, il intègre la marine et devient maître d’hôtel personnel du pacha. À la suite de quoi, Alain Ducasse, qu’il a connu lors de stages, lui demande d’aller officier à l’Hôtel de Paris à Monaco où ildevient chef de parti durant 4 ans. Après cette expérience dans un trois étoiles au Guide Michelin, les portes s’ouvrent d’elles-mêmes. De fil en aiguille, il est sollicité par Jacques Maximin pour rejoindre La Rotonde près de Lyon déjà auréolé d’une étoile.
Il accède rapidement à la place de second aux côté du chef Philippe Gauvreau. Ensemble, ils iront chercher le deuxième macaron en l’an 2000 : « L’étoile c’est un autre monde, c’est ma plus belle réussite. On a tellement travaillé pour en arriver là. » détaille-t-il. L’objectif atteint, il souhaite devenir chef à son tour et rejoint le Royal Champagne à Champillon. Philippe Augé travaille immédiatement à ce que la table ne perde pas son étoile et par conséquent, il obtient son premier macaron personnel en 2001. En place jusqu’en 2007, il maintient ce niveau d’exigence jusqu’à se lancer en quête d’un nouveau challenge.

Devanture Hostellerie Levernois
Devanture Hostellerie Levernois
© Restaurant Hostellerie Levernois
Extérieur Hostellerie Levernois
Extérieur Hostellerie Levernois
© Christophe Fouquin
Restaurant Hostellerie Levernois
Restaurant Hostellerie Levernois
© Christophe Fouquin
Hostellerie Levernois
Hostellerie Levernois
© Christophe Fouquin

Dans les strating-block

Conseillé par l’étoilé Patrick Henriroux, Philippe Augé se présente à l’Hostellerie de Levernois qui s’apprête à changer de chef : « Je n’étais pas intéressé par le lieu mais uniquement par le défi. J’aurai aussi bien pu aller à Tourcoing ou Roubaix. » explique-t-il sans détour. L’alchimie avec Jean-Louis Bottigliero est immédiate, si bien que le soir venu, il visite les cuisines : « Le Bistrot venait d’ouvrir et le chef était en difficulté. Je ne me suis pas posé de question, j’ai enfilé ma veste et je suis allé l’aider. ».

Il n’en fallait pas plus pour être embauché : « Je m’étais donné 3 ans pour garder l’étoile et mettre en place l’offre de bistrot. Seize ans plus tard, je suis toujours là et l’étoile aussi. ». De ses illustres mentors, Philippe Augé a conservé la technique, les valeurs et le goût des choses simples : « Je me souviens d’une fois auprès de Jacques Maximin où nous avions 200 jarrets de lapin à cuisiner. Ni une ni deux, il a lancé un pot-au-feu. Il n’y avait pas de produits nobles, juste du lapin et des légumes. Et encore aujourd’hui j’ai le goût dans la tête… ». À Levernois, il fait une cuisine qu’il aime : « J’utilise mes bases classiques pour faire une cuisine qui me ressemble. Comme on fait un bouquet de fleurs, je pars d’une sauce, d’un beau produit de saison et je construis autour. La cuisine, c’est une forme d’art. ».

 

Comme on fait un bouquet de fleurs, je pars d’une sauce, d’un beau produit de saison et je construis autour. La cuisine, c’est une forme d’art !
Phillipe Augé

Pour Philippe Augé, la sauce est primordiale et c’est un élément qu’il travaille sans relâche : « Je n’utilise aucune farine, j’épaissis mes jus de viande, de poisson et de carcasse uniquement par la réduction. S’il y a 1 litre au départ, il n’y a que 20 centilitres à la fin. ».

Ses cuissons sont effectuées sous vide pendant une, deux, voire trois nuits de suite. La qualité des produits bruts est tout aussi importante et pour cette raison, le chef pioche autant que possible chez les producteurs locaux, en fonction de ce qu’ils ont à proposer à l’instant T, mais aussi dans le potager bio de l’Hostellerie avec l’objectif à terme d’être autonome en légumes pour la table gastronomique. Pour mettre en place une recette, cela peut prendre 3 minutes comme des semaines : « Il y a une part d’instinct. Parfois, j’arrive à 18 heures, j’ai une idée en tête, je la réalise et l’envoie en salle immédiatement. Je suis joueur ! ».

 

Phillipe Augé
Phillipe Augé
© Christophe Fouquin
La terrasse du Bistrot du bord de l'eau
La terrasse du Bistrot du bord de l'eau
© ChristophChristophe Fouquine Fouquin

Travail d’équipe

Le chef étoilé a toujours un cahier à côté de son lit pour pouvoir noter toutes les fulgurances culinaires qui le traversent. Il pense à une acidité, une sauce, un goût, même au milieu de la nuit. Il lui arrive également de lancer un thème ou une idée et de laisser sa seconde, Céline Rouleux, et le chef du Bistrot du Bord de l’Eau, Alexis Valton, travailler dessus ensemble. « Avec ma brigade, nous sommes le XV de France, on est une équipe et on doit marquer les esprits. Sans mes collaborateurs, je ne fais rien. », un parallèle qui résume bien l’état d’esprit d’un chef qui s’impose 4 à 6 heures de sport par semaine pour évacuer la pression. Il faut être régulier et exigeant pour conserver l’étoile : « Quand les clients découvrent leur assiette, ils se disent que c’est pas mal et quand ils dégustent, ils sont surpris et bluffés. Pour arriver à ce résultat, tout doit être parfait tout le temps. La viande, il faut que ce soit fondant comme du beurre. Les cuissons doivent être belles, autant que les sauces et les garnitures. ».

Dans chacune des assiettes du chef étoilé, il y a toujours un fondant, un croquant, un glacé et trois saveurs maximum. C’est d’ailleurs de cette manière qu’est construite sa recette signature réputée au-delà des frontières de la Bourgogne, à savoir le risotto vert, cuisses de grenouilles et escargots. Sans coller aux tendances, le chef suit son époque. Au fil du temps, sa cuisine s’est allégée, il propose des mets à partager découpés et servis sur table avec un juste soupçon de théâtralité, mais aussi des plats végétariens et réfléchit même à travailler une viande hallal. « Je m’adapte à ce que souhaitent mes clients et je leur laisse toujours un choix raisonnable pour qu’ils puissent se faire plaisir, selon leurs envies. ».

Table Hostellerie Levernois
© Hostellerie Levernois

La cerise sur le gâteau

Rejoint en 2022 par le chef pâtissier Lucas Chambfort, la cuisine de Philippe Augé est désormais complétée par une audacieuse touche sucrée. À la table gastronomique comme au Bistrot du Bord de l’Eau ainsi qu’au tea time, il propose des saveurs astucieusement régressives et gourmandes. Il ouvre également de nouveaux horizons en mariant le chocolat à la moutarde ou encore l’abricot à la sarriette et à l’huile d’olive. En utilisant un maximum de produits frais et bio récoltés dans le potager de l’hostellerie créé et entretenu par Baptiste Courcet, lui-même ancien chef pâtissier, Lucas Chambfort n’hésite pas à travailler les légumes, des épices peu communes ou encore des condiments. Si plusieurs décennies se sont écoulées depuis sa création, L’Hostellerie de Levernois a su rester une institution incontournable de la région et garder l’esprit étoilé de son créateur tout en épousant avec recul et discernement le virage de la modernité.

Hostellerie Levernois
Hostellerie Levernois
© Hostellerie Levernois
Parc Hostellerie de Levernois
Parc Hostellerie de Levernois
© Hostellerie Levernois

En villégiature sur la côte beaunoise

Séverine Pétilaire-Bellet a déjà posé les jalons de la nouvelle ère de l’Hostellerie. En plus des rénovations des chambres existantes, de l’accueil, du bar et encore du Bistrot du Bord de l’Eau, 7 nouvelles villas ont vu le jour, soutenues par une superstructure au-dessus du pavillon. Plus spacieuses et indépendantes, elles s’intègrent parfaitement dans le paysage boisé et offrent une vue imprenable sur la nature environnante. Un couloir de nage long de 30 mètres a également été installé. Inspiré d’un lavoir ancien, il est entouré d’authentiques pierres de Bourgogne et apporte la juste touche de minéralité dans un décor végétal. Celui-ci est la première étape des nouveaux équipements bien-être qui ouvriront leurs portes en début d’année prochaine, à savoir un spa Sisley aménagé dans l’un des bâtiments historiques. Piscine intérieure, jacuzzi extérieur, bain froid en inox pensé comme une cuve de vinification, sauna, hammam, salle de fitness imaginée comme une cabane au milieu des bois qui efface les frontières entre l’intérieur et l’extérieur… Un ensemble qui répond au besoin des clients de se ressourcer et d’opérer une déconnexion avec le rythme et l’urbanité de la vie quotidienne.

De nouvelles chambres et suites prendront également place au-dessus du spa afin d’augmenter le nombre de clefs sans pour autant réduire les espaces existants. Tout est minutieusement pensé pour créer une ambiance de village apaisé qui s’intègre parfaitement dans ses contours naturels, sans rien enlever au luxe attendu. Plutôt que de construire en bétonnant, la nouvelle propriétaire s’est engagée dans une démarche environnementale rare dans le domaine de l’hôtellerie très haut de gamme. Elle a déjà fait replanter 2000 arbres pour enrichir la parcelle boisée classée en impliquant l’ONF dans le choix des essences, a créé un potager bio de plus de 3000 m2, s’apprête à créer un jardin des simples garni d’herbes médicinales… L’écrin de l’Hostellerie de Levernois est un trésor grandiose que Mademoiselle s’est engagée à protéger.

Hostellerie de Levernois (1)
Hostellerie de Levernois (1)
Hostellerie de Levernois piscine
Hostellerie de Levernois piscine
Hostellerie de Levernois (3)
Hostellerie de Levernois (3)
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