À l’occasion de cette inauguration, nous avons rencontré François-Xavier Delmas, le fondateur du Palais des thés, mais surtout passionné par son métier et par le thé. Arrivé dans l’univers du thé, comme il aime le rappeler, il a su s’intéresser et se passionner pour ce breuvage unique. Aujourd’hui, il parcoure le monde à la recherche de pépites gustatives, toujours dans le but de ravir nos papilles. Après quelques minutes passées avec lui, nous sommes ressortis la tête pleine de connaissance et de saveurs, avec l’envie de goûter et de voyager !

Palais des Thés Dijon Toison d'Or

Entretien avec François-Xavier Delmas, fondateur du Palais des thés

L’origine du thé

Le thé a donné naissance à des rituels, dans la plupart des pays. Le thé vient de Chine, il est apparu il y a 3 000 ans, et au départ c’est les moines qui ont fait pousser le thé et voyager le thé de Chine jusqu’à la Corée et le Japon. Mais à chaque fois que le thé est apparu quelque part, il y a eu des rituels, des objets : pour faire le thé à la menthe, on ne prend pas les mêmes objets que pour faire le thé à l’anglaise. Mais dans les deux cas, il y a un même rituel, très fort, très puissant, d’hospitalité. On se dit « on va préparer le thé pour quelqu’un ». Le thé est très très fort culturellement en fonction de comment les gens se le sont appropriés. Ils ont créé des rituels avec. Au Tibet, vous avez ce beurre au beurre de yaks, avec des grumeaux. On prend le thé au petit déjeuner, c’est assez particulier. Il s’agit d’une soupe brûlante, servie dans un grand bol, avec dedans des gros grumeaux de beurre de yaks rances. Cela fait un contraste bizarre parce que la graisse est très froide. Et comme vous savez que vous allez marcher pendant des heures et qu’il fait très froid, vous « l’appréciez », cela tient au corps.
Ce rituel fait écho aux premiers usages du thé, qui était de manger le thé et non pas de le faire infuser comme on le fait maintenant. En fait il y a eu 3 stades dans le thé : d’abord on a mangé les feuilles, après on a pulvérisé les feuilles (comme le matcha) et après on a fait infusé les feuilles.
Le thé est riche humainement de tous ces apports qu’on fait les populations partout où il est arrivé. À chaque fois, il y a ce sentiment d’hospitalité et l’idée de maintenir l’esprit en éveil.

Le thé n’est pas un excitant, mais un stimulant

Il y a pleins de gens pour lesquels cela fait peur de boire du thé après 17h « oulala ça y est je ne vais pas dormir ». En fait, si au départ le thé a été d’un monastère à un autre monastère, à un troisième monastère, que les moines se sont baladés, avec l’envie de le faire connaitre, c’est à cause de cette qualité du thé qu’il a de maintenir l’esprit en éveil et d’aider à l’assimilation des connaissances. Le thé vous donne la capacité à vous concentrer sur quelque chose, à mémoriser les choses, à pouvoir lire, à apprendre… C’est ça qui a fait que des moines ont été apporter le thé de Chine en Corée, au Japon. Et donc assez curieusement, ce qui fait peur aujourd’hui, c’est presque un contre-sens. Le thé n’est pas un excitant, mais un stimulant.

Il a cette capacité à maintenir l’esprit en éveil.

C’est quelque chose de fort. Le thé est une pause partout dans le monde, ce n’est pas stressant, on s’arrête et on prend son temps.

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Dans le thé, comme dans le café, il y a de la caféine. On a donné le nom « théine » à la fin du 19ème, avant de se rendre compte que la molécule était la même. Mais elle n’agit absolument pas de la même manière, parce que le thé a d’autres choses, notamment les tanins, entre autres, qui gênent énormément la caféine pour aller dans les veines. En gros, la caféine du café, elle va dans vos veines tout de suite. La caféine du thé, elle a beaucoup de mal à y aller. Et du coup elle va y aller pendant une période beaucoup plus longue, mais beaucoup plus lentement. D’où cette idée d’esprit en éveil. Plus un thé va être riche en bourgeon, plus il sera récolté au été, plus il sera fort en caféine. La température d’infusion joue également un rôle énorme. La caféine est très soluble dans l’eau bouillante. Mais par exemple, vous aimez un thé vert japonais, qui se prépare à 60°, la caféine a beaucoup de mal à passer car l’eau n’est pas brûlante. Si vous avez un doute, vous pouvez toujours détéinez votre thé en rinçant les feuilles : vous préparez votre thé, vous versez votre eau chaude puis vous versez votre première eau, afin de ne dégustez que la seconde. L’essentiel de la caféine est parti. On perd par contre un peu de goût et c’est dommage.

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Une passion depuis plus de 30 ans

Je pense tous les jours à la chance que j’ai d’aller chercher les thés. Je vais les chercher moi-même : derrière toutes les boites, j’ai des visages et des paysages.
Ça fait 30 ans que je me passionne pour le thé, une vie ne suffit pas pour connaitre le thé. C’est comme le vin. Plus on en sait, plus ça ouvre de nouveaux champs, sur l’enrichissement des sols, la culture…
Pour les thés d’origine, on a 2 sélections : il y a les thés du catalogue, que l’on trouve à tout moment de l’année et il y a une famille dont je m’occupe, qui s’appelle les grands crus, qui sont des thés rares et qui sont fait juste à un moment de l’année. Et donc ma quête, tout au long de l’année, c’est d’aller chercher tout pour cette sélection de grands crus. C’est des contacts, des discussions avec un fermier, du bouche à oreille… C’est devenu au fil du temps une passion incroyable.

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Et le café dans tout ça ?

Ça fait au moins 10 ans que je n’ai pas bu de café. J’aime par contre beaucoup l’odeur du café. Cela me suffit. Je ne vois pas l’intérêt de metre du café dans la bouche, je me contente de le sentir et d’apprécier. Pour le thé, l’olfaction est un sens majeur. Je passe beaucoup de temps à sentir le thé, à le mettre en bouche… Mais l’olfaction des feuilles de thé qui ont infusé c’est très intéressant, c’est même presque plus important que le goût. Il y a le goût, le toucher et l’olfaction.