Dans la petite rue de l’église de Vincennes, la tanière de L’Ours passerait presque inaperçue. Lorsque l’on pousse la porte de sa devanture, on pénètre dans un univers à la fois champêtre, sauvage et onirique. Un bel ours brun empaillé, que le chef Jacky Ribault a chiné quelques mois avant l’ouverture du restaurant, accueille les convives. Pour rejoindre sa table, il faut traverser un couloir en béton brut incrusté de feuilles d’or, et orné de panneaux de tâpisserie aux motifs feuillus. “Ce couloir est comme un sas de décompression”, aime à dire le chef. Il permet également de ménager le suspens avant l’arrivée dans la grande salle, dont le bel espace a été aménagé par Caroline Tissier, architecte et décoratrice d’intérieur. Les matériaux bruts tels que l’acier, le marbre et le bois y côtoient le velours, les couleurs chaudes et les fleurs séchées. Chaque table est différente et dressée simplement, avec un dessous d’assiette effet peau d’ours, un couteau de chasse dans un étui en cuir et un verre en céramique.
“Je voulais que, dans la décoration de L’Ours, il y ait notre patte, explique le chef. du brut, mais aussi du raffiné.”

© Jérôme Galland

© Jérôme Galland

© Jérôme Galland

© Jérôme Galland
Pas de carte ni de menu, pour poursuivre l’expérience, il faut faire confiance à l’hôte… “J’imagine mes plat au dernier moment, à l’intuition”, assure Jacky Ribault. Dans l’assiette, il nous enchante en jouant les contrastes : il mêle terre et mer, goûts francs et saveurs délicates, animal et végétal, produits locaux et parfums d’ailleurs. L’araignée de mer est servie comme un tapis de mousse verdoyant sur une pierre creuse. La lotte pochée et sa sauce acidulée à la mangue sont dissimulées sous une poignée d’algues séchées. Le foie gras se présente en gyoza et s’accompagne d’un jus de betterave. Le chevreuil, les touches de topinambour ou de navet rappellent la terre à laquelle est attachée le cuisinier. “C’est mon énergie, confie le chef issu d’une famille de paysans. J’ai été élevé à la ferme et j’ai tué mon premier cochon à 9 ans. Mon père préparait les haricots verts du jardin et les lapins qu’il avait chassés. Mon enfance a été bercée par cet amour des produits.” Les recettes, qui changent régulièrement, s’appuient, autant que possible, sur un approvisionnement local. “Mon pêcheur d’Île-de-France me fournit en sandre, en écrevisse et en silure, détaille le chef. Et mes fromages viennent d’une ferme de Seine-et-Marne… ne cherchez pas le Comté, il n’y en a pas !” De l’environnement à l’assiette, L’Ours nous entraîne dans son univers bucolique et presque magique : c’est “une expérience, de l’accueil au café”, comme
l’a voulu Jacky Ribault.