Nicolas Isnard et David Le Comte. Les deux chefs de L’Auberge de la Charme sont aussi différents que complémentaires.

Le premier est volubile. Il parle avec passion et envie de leur métier et de leur parcours ; le second semble plus posé. Il écoute, sourit et confirme de la tête chacune des explications fournies. « Vous pouvez nous faire parler tous les deux en même temps, de toute façon on est toujours d’accord. On s’aime, on a la même sensibilité, la même vision de l’entrepreneuriat et du côté humain. Ça fait 14 ans que l’on travaille ensemble et on ne s’est jamais fâché ! », s’amusent-ils à expliquer. Il est vrai que leur histoire est belle : ils parlent même de « coup de foudre » amicale et professionnel. « En 2004, quand on s’est rencontré à L’Auberge du Vieux Puits de Gilles Goujon, à Fontjoncouse, près de Narbonne, j’avais 26 ans ; David, 22 ans. Là-bas je suis aussi tombé amoureux de Cécile, mon ex-femme qui reste toujours notre troisième associée. Après avoir posé une étoile dans chacune des deux maisons où nous sommes ensuite passés (NDLR : le château de Curzay, près de Poitiers et le chalet d’Adrien, en Suisse), j’ai reçu un appel de David Zuddas qui souhaitait vendre Prenois. On est venu manger la même semaine : cette maison de charme et de caractère nous a extrêmement plu avec ses matières brutes et ses poutres apparentes ; la dimension campagne non loin de la ville était idéale aussi puisque Prenois est très facilement accessible de Dijon. » Voilà comment l’aventure des deux sudistes a démarré. C’était en 2008. Une année charnière pour Nicolas Isnard et David Le Comte. « On a signé le 2 juin ; le 6, on proposait notre premier service. Mon second fils est né en août, sa fille en novembre. » Nicolas se souvient des dates comme si c’était hier ! Puis rapidement les choses s’enchaînent. En mars 2009, L’Auberge de la Charme décroche son étoile au guide Michelin et en 2010, les envies d’entreprendre du couple Isnard-Le Comte se poursuivent. Ils créent Kook’in Traiteur à Norges-la-Ville, dédié à l’événementiel, géré par Louis Sifferlin, et deviennent la même année traiteur officiel du DFCO. Depuis deux ans, ils mettent les petits plats dans les grands à chaque match à domicile puisque dans la tribune présidentielle le DFCO a ouvert une salle de réception, Les Coulisses by La Charme, qui peut accueillir jusqu’à 200 convives.
Une entreprise plus qu’un restaurant « Aujourd’hui, nous sommes autant des chefs d’entreprise que des chefs de cuisine », poursuit Nicolas Isnard. S’ils étaient six personnes à L’Auberge de la Charme en 2008, ils sont aujourd’hui 40 collaborateurs, sans compter les extras. « Tous les mois, nous établissons 70 fiches de paye. » Et là Nicolas Isnard part dans une grande envolée narrative comme on les aime. « Ce qui est le plus excitant dans notre métier : c’est ce qu’il reste à faire. Si je garde à l’esprit que notre carte maîtresse est de créer des plats et des assiettes qui font rêver, j’aime tout autant organiser un événement en partant d’une salle vierge pour la partie traiteur. Faire grandir et progresser nos collaborateurs est aussi très exaltant. Il faut dire que grâce aux professionnels qui nous entourent, on délègue notre travail au quotidien, et cela nous laisse le temps de faire autre chose…»

Passion Asie
Cette autre chose dont Nicolas parle, ce sont ses envies d’ailleurs et sa passion pour l’Asie. Car là est la différence fondamentale entre les deux garçons. Nicolas voyage très régulièrement là-bas depuis dix ans ; David est beaucoup plus sédentaire. « Il faut dire qu’il parle anglais contrairement à moi », précise ce dernier. « Hong-Kong, Saigon, Bangkok, Hanoi, j’adore les ambiances de ces villes, leur food, la fraîcheur des plats vietnamiens, le piment des plats thaïlandais. Cela me ressource et m’inspire. Leur street food aussi me fait rêver. Avec un barbecue dans la rue, des casseroles et de bons produits, ils font des choses extraordinaires ! » Nicolas raconte alors comment l’ancien roi de Thaïlande, Bhumibol Adulyadej, de son vivant avant 2016, a fait brûler les cultures d’opium pour les remplacer par des fruits, des légumes et de l’élevage animal : boeuf et cochon en majorité. « A Chiang Mai, la deuxième ville de Thaïlande, la food est devenue primordiale ; quand la compagnie x2 Resorts qui avait déjà une cinquantaine d’hôtels de luxe m’a contacté, le feeling est passé et j’ai décidé d’ouvrir notre premier restaurant là-bas avec eux. » Le River Side vient donc d’être lancé avec quinze personnes en cuisine pour une trentaine de places assises. « Ce sera une cuisine française avec des produits 100 % thaïs. Une cuisine fusion, sans piment, la clientèle étant essentiellement étrangère : c’est un endroit très prisé par les touristes. »
L’histoire se poursuit ailleurs encore aux confins de la Géorgie, à Tbilissi, sa capitale où le duo met sa patte à un autre restaurant à la touche très « frenchy ». Ouverture prévue à Noël. Et fi n 2018, ils visent Bangkok !

Le goût juste
Revenons un peu sur nos terres, car à Dijon, une autre table d’Isnard et Le Comte fait référence : Le Bistrot des Halles. Associés à Eric Carrière depuis l’été 2012, Nicolas et David vous convient à cette adresse à côté du marché :
un bon plan à partager sans modération. Mohamed Veroo, chef de cuisine, Syrien d’origine propose des plats qui sentent bons les mélanges de saveurs entre l’Asie et la Bourgogne : risotto d’escargots de Bourgogne, tiramisu cassis, rouleaux de printemps au wakamé (une algue), gambas et wok de légumes, émulsion citron-gingembre… « Aujourd’hui je laisse carte blanche à Mohamed, il aime créer… et dire qu’il est rentré chez nous comme commis!» Revenons enfi n aux sources et parlons un peu des règles culinaires de L’Auberge de la Charme : ici la cuisine est de saison ; les chefs travaillent sans fi let. « Avec Anthony Lamome, notre chef de cuisine, on prend un café à 8 h et on décide des plats que nous allons préparer. Un vrai confort et un plaisir de faire les choses ensemble avec de bons produits. J’aime cette interactivité », s’enthousiasme Nicolas. Côté clients, c’est simple, ils choisissent entre trois, cinq ou sept plats pour 53 euros, 73 euros ou 99 euros le menu. « On leur demande quand même s’ils ont des allergies ou contraintes alimentaires et après on se lance en cuisine ! » L’action, telle est peut-être là le maître-mot des deux garçons. Parce que « demain sera la plus belle journée de notre vie ! » glisse Nicolas Isnard. Conclusion validée !

Bientôt un hôtel
Courant 2018, vous n’aurez plus besoin de prendre votre voiture pour regagner vos pénates, L’Auberge de La Charme aura son hôtel avec six chambres, terrasse privative, jacuzzi, sauna et jardin japonisant. Luxe et zen !