Un parfum de révolution et le goût des macarons : s’il aime dès qu’il le peut se mettre aux commandes de son ROBIN DR 221 pour aller tutoyer les cieux, ce n’est pas la tête en l’air que William Frachot s’emploie à décrocher les étoiles mais bien les pieds sur terre, aux commandes des cuisines de l’Hostellerie du Chapeau Rouge.

Un deuxième macaron Michelin est venu s’ajouter au premier en avril dernier, un atout séduction supplémentaire pour ce grand établissement dijonnais en perpétuel changement depuis 14 ans et qui vit cette fois encore une ample et belle métamorphose.

William Frachot, des racines et des ailes
L’aviation est sa passion, une soupape aussi pour celui qui déclare qu’en haut on oublie tout et que l’empêcher de voler reviendrait à lui couper les ailes dans la vie en général. Au travail le chef (de cuisine et d’entreprise) a fait sienne la citation de Samuel Beckett « se donner du mal pour les petites choses, c’est parvenir aux grandes avec le temps ». Une façon de résumer ce que représente pour lui cette deuxième étoile : la maturité, la sagesse et l’évolution de la maison après quatorze années de travail et une première étoile acquise en 2003.

Autodidacte effréné
Une réussite que le chef voit comme le résultat de la mise en place progressive d’une foule de détails et d’une équipe. « C’est une histoire d’hommes et de femmes. Ce sont les fournisseurs, l’équipe de salle, la sommellerie qui font une belle et grande maison dans son intégralité. Aujourd’hui le Chapeau a cette force là. »

Cette expérience de chef et de manager, William Frachot l’a connue à l’âge de 21 ans lors de sa première expérience professionnelle en Angleterre. Propulsé professeur de cuisine dans une école hôtelière avec un restaurant d’application en centre ville, l’aventure a été un véritable accélérateur. « Il fallait gérer les cuisines, les élèves comme des employés, les fournisseurs et les clients… Je me suis posé tout un tas de questions sur chaque partie du métier. Quand les vraies cuisines ont commencé à me manquer je suis reparti en France où  j’ai passé 6 mois en tant que stagiaire chez Loiseau, Lameloise et Gillotte. J’ai observé chacun de leurs savoir-faire et j’ai obtenu des réponses. » Fort de cette nouvelle expérience, le jeune homme part à Montréal où il fait ses nouvelles armes durant trois ans auprès de Normand Laprise et Nicolas Jongleux.

Grâce à cette aventure outre-Atlantique, William Frachot rentrera en France avec pour bagage un solide melting-pot d’influences qui lui donnera le style qu’on lui connait depuis.

La cuisine de l’essentiel
Sa philosophie aujourd’hui : une cuisine centrée sur le produit. En amont savoir choisir les meilleurs fournisseurs puis éviter tout ce qui n’apporte rien gastronomiquement. Juste un excellent produit, une cuisson parfaite, un jus réalisé dans les règles de l’art et visuellement, de l’élégance dans la simplicité. « Jeune, on veut époustoufler avec une assiette super bien montée qui s’avère juste casse-gueule au moment du service. En vieillissant on a envie d’être soi-même avec sa cuisine, pas forcément d’épater la galerie, sauf à travers le goût. »

C’est ce qui se passera avec le « ris de veau sauce carbonara » et la « raviole langoustine et foie gras truffe du Périgord », deux plats très aboutis.

Important également, savoir mettre une région en avant. L’identité de la Bourgogne existe donc mais à travers des classiques savamment revisités tels que l’œuf de caille en meurette, un foie gras pain d’épices cassis, une truite de l’Yonne et sa confiture d’oignon pinot noir, un jambon persillé froid en été, chaud en hiver. Bientôt mangés à la sauce Frachot, l’escargot et le bœuf bourguignon sont également en passe d’être déclinés en bouchées originales.

L’inspiration dans le produit
« Quand le gars qui t’a vendu un produit magnifique, te parle de sa façon de cultiver ses légumes, d’élever sa volaille, tu le suis dans sa démarche et il se passe quelque chose qui te permet de mettre le produit en valeur. »

L’autodidacte a puisé l’essence de son métier dans la curiosité, en se posant des questions et en allant manger à d’autres tables. Il admire la cuisine d’Alain Passard qui n’a rien à voir avec la sienne mais qui à sa façon mise tout sur la cuisson et le produit. Chez Pascal Barbot, il aime l’aboutissement d’un travail qui suit la même philosophie mais qui en plus propose une maîtrise technique, graphique, d’une justesse esthétique impressionnante. « Ce sont deux cuisiniers qui me donnent confiance dans ma démarche. Quand je crée aujourd’hui, je m’appuie sur ce que j’ai ressenti chez eux. »

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Coup de gueule en cuisine
Et quand il parle d’émotion en cuisine, le chef dénonce certaines dérives du Net. « Je ne supporte pas les critiques de plats faites sur Facebook et certains blogs, à travers des photos, sans qu’il y ait eu dégustation ! On est en train de faire oublier l’essentiel de notre travail qui est de donner de l’émotion. Et l’émotion passe par le goût, les parfums, la qualité du travail en salle, la décoration, le moment passé. Pour se rendre compte, il faut aller au restaurant, dîner, prendre le temps, se réveiller le lendemain et ressentir ce qu’il reste de l’expérience vécue. »

Métamorphose zen et gourmande

Le Chapeau Rouge lové dans un bâtiment historique de 1863 a conservé son charme d’antan même si William Frachot a su lui apporter au fil des années, tout le confort moderne et la décoration qui sied à un hôtel du 21ème siècle.

Des années de travaux ont transfiguré l’endroit. Couleurs chaudes, lumière tamisée et vitres en verre dépoli pour échapper aux regards, l’ambiance feutrée du restaurant de William Frachot est une invitation à faire une pause confidentielle. Un lieu parenthèse où la déco se rapproche de la nature à la fois végétale, minérale, animale.

Quant à l’hôtel, les chambres ont été repensées de manière originale et gourmande. A travers des tons modernes chocolat et acidulés, les desserts du chef mis en scène sur des panneaux très grand format mettent l’eau à la bouche !

Côté bien-être, le spa créé en 2011 propose hammam, sauna, douches hydromassantes et massages. Un élégant cocon où le mot « détente » prend tout son sens.

Céline Colle

Hostellerie du Chapeau Rouge           
5 rue Michelet
21000 Dijon
03 80 50 88 88
www.chapeau-rouge.fr